La non-réitération de la vente n’est pas imputable à l’acquéreur qui demande un prêt non conforme aux stipulations de la promesse de vente dès lors que la banque lui aurait de toute façon refusé le prêt, peu importe qu’il ait obtenu un accord de principe.
Une promesse de vente est conclue sous condition suspensive de l’obtention d’un prêt remboursable en deux ans. Une banque oppose un refus, une autre ne donne qu’un accord de principe. La réitération de la vente n’ayant pas lieu, le vendeur reproche à l’acquéreur d’avoir empêché la réalisation de la condition suspensive en demandant un prêt non conforme aux stipulations de la promesse de vente. Il réclame le versement d’une somme au titre de la clause pénale.
La cour d’appel de Grenoble condamne l’acquéreur à verser le montant de la somme séquestrée au titre du dépôt de garantie. Elle retient d’abord qu’aucune faute ne pouvait lui être reprochée pour avoir sollicité un prêt non conforme aux stipulations du contrat, dès lors que la banque lui aurait de toute façon refusé le prêt en raison de l'insuffisance de ses capacités financières. Puis, elle relève que ses ressources mensuelles et la valeur de son bien immobilier s’il était vendu ne permettraient pas de rembourser le crédit à l’issue des deux ans. Elle retient que la non-réitération de la vente est imputable à l’acquéreur car il s’est engagé avec une légèreté blâmable et a obtenu le principe d’un accord de financement.
Cassation. D’une part, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations relatives à l’absence de faute des acquéreurs dans la défaillance de la condition suspensive. D’autre part, un accord de principe ne constitue pas une offre ferme et sans réserve caractérisant l’obtention d’un prêt.
A noter :
La condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement (C. civ. art. 1304-3).
En principe, l’acquéreur doit déposer une demande de prêt conforme aux stipulations de la condition suspensive pour pouvoir se prévaloir de sa défaillance en cas de refus de prêt. Cependant, si la condition suspensive ne pouvait pas se réaliser, son bénéficiaire n’est pas fautif d’avoir manqué à ses obligations (Cass. 3e civ. 15-12-2010 n° 10-10.473 : Bull. civ. III n° 225, l’acquéreur n’ayant pas déposé sa demande de permis de construire lorsque celle-ci n'aurait pas pu être acceptée en raison des contraintes du POS ; Cass. 3e civ. 11-9-2012 n° 11-22.345 F-D : RJDA 12/12 n° 1062, l’acquéreur déposant une demande de permis de construire pour une surface inférieure aux stipulations de la promesse puisqu'une demande portant sur la surface convenue aurait été refusée).
L’arrêt illustre cette solution au cas d’une demande de prêt.
L’arrêt rappelle qu’un accord de principe ne vaut pas offre de prêt caractérisant l’obtention du prêt. Cette notion s'entend de « la présentation par un organisme de crédit d'une offre régulière ferme et sans réserve correspondant aux caractéristiques du financement de l'opération stipulées par l'emprunteur dans l'acte » (Cass. 1e civ. 9-12-1992 n° 91-12.498 P : RJDA 3/93 n° 239 ; Cass. 3e civ. 7-11-2007 n° 06-17.413 P : RJDA 3/08 n° 245). Lorsque la condition suspensive d'obtention de prêt n'est pas réalisée, toute somme versée d'avance par l'acquéreur à l'autre partie ou pour le compte de cette dernière est sans délai et intégralement remboursable sans retenue ni indemnité à quelque titre que ce soit (C. consom. art. L 313-41, al. 2). Le versement d’une somme au titre de la clause pénale n’était donc pas justifié.
Source : Cass. 3e civ. 9-11-2023 n° 22-13.900 F-D, L. c/ Sté A2C Alpes constructions contemporaines
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